Catastrophe de Courrières : le devoir de mémoire de l’ANGDM

, par Souad Daho

118 ans après le drame, nous n’oublions pas

Samedi 10 mars 1906, il est 6h34, lorsqu’un « coup de poussière » d’une rare violence dévaste en quelques secondes 110 km de galeries. À plus de 1 000 km/h, la flamme parcourt les galeries des fosses 2 à Billy-Montigny, 3 à Méricourt et 4 - 11 à Sallaumines.

1 700 mineurs de la Compagnie minière de Courrières étaient au travail ce jour-là.

1 099 personnes ont perdu la vie dont 242 enfants

Les opérations de sauvetage sont prises en charge par l’ingénieur en chef du service des mines, représentant l’État. Le 11 mars, un groupe de sauveteurs allemands de la Ruhr, parfaitement entraînés et munis des appareils respiratoires des plus modernes, arrive sur les lieux de la catastrophe. Le 30 mars, à 8h, treize mineurs surgissent à l’air libre par la fosse 2 de Billy-Montigny. Un quatorzième rescapé, Auguste Berthon, est retrouvé le 4 avril par des sauveteurs, dans le puits 4 de Sallaumines.

Le risque d’un coup de grisou était pourtant faible pour cette exploitation. C’est en effet un feu de mine découvert quelques jours avant le drame dans l’une des veines de la fosse de Méricourt qui est la cause principale de la catastrophe. Plusieurs barrages en pierres, en cailloux et même en béton avaient été construits pour étouffer l’incendie. Mais ces constructions sont restées insuffisantes.

Repenser la sécurité en fond de mine

La plus grande catastrophe minière d’Europe représente un tournant en matière de sécurité. Cet évènement a amené les dirigeants politiques comme la communauté scientifique, à repenser les systèmes de sécurité en fond de mine.

La catastrophe de Courrières a été qualifiée comme « une catastrophe exemplaire » (R. Schwartzmann, Le Drame de Courrières, Nouvelles Editions Sutton, juillet 2005) car elle est une prise de conscience profonde, immédiate et générale du danger présenté par les poussières combustibles.

Le devoir de mémoire de l’ANGDM

Dimanche dernier, le 10 mars 2024 Catherine Griboval, directrice régionale Nord a représenté l’ANGDM aux cérémonies de commémoration de la catastrophe de Courrières. Une gerbe a été déposée à Méricourt près de la stèle où se sont réunis, pour se souvenir et se recueillir, les élus, les associations d’anciens mineurs, les organisations syndicales.

Hommage littéraire

Jules Mousseron, le célèbre poète mineur a rendu hommage aux victimes de Courrières par ces quelques vers :
« Salut ! ô martyrs de Courrières,
Brav’s carbonniers nés pour l’douleur !
O pauves gins ! Oh ! les pauv’s frères
Combin nous pleurons vos malheurs.
C’mint s’mettr’ pareille affaire in tiête ?
Douz’ chints mineurs périr dins l’feu
Sans pouvoir pinser eun’ minette
>L’infant à s’mère, el père à s’fieu !
Anéantis par l’flamme et l’soufre
Tous ces innochents sont brûlés
Collés dins les poussièr’s du gouffre
S’étreignant par group’s affolés.
Ch’est est fini ! pus jamais d’caresse !
Pus d’joi ! pus d’pain et pus d’bonheur !
Tous les corons ont l’mêm’ tristesse,
Tout’s les maisons ont l’mêm douleur. »

Elan de solidarité

Dès les premiers jours, un mouvement de solidarité se met en marche : des dons affluent du monde entier. La riche famille Rothschild fait un don de 100 000 francs, le Pape 20 000 francs. Aussi en 3 mois, plus de 7 millions de francs sont récoltés.

La colère des familles de victimes

Après le deuil vient la colère des familles et des survivants. Les mineurs sont en grève. Ils étaient 50 000 le 19 mars 1906. Elle dure trois mois. Les familles sont en parties indemnisées et le travail au fond reprend progressivement.